Je ne publie ici qu'une traduction, celle d'un article publié le 9 octobre sur son blog par Edward Snowden sous le titre Votre argent ET votre vie, Les monnaies numériques de banques centrales vont rançonner notre avenir
.
Nul besoin de souligner qu'il est un homme dont la parole compte.
Compte tenu de la longueur de son texte, bien peu de gens feront rĂ©ellement l'effort de le lire en anglais mĂȘme si chacun jurera le contraire, comme on jure n'avoir aucun problĂšme Ă tenir une rĂ©union de travail en anglais, en plein Paris, dĂšs qu'on a cru devoir inviter un nĂ©o-irlandais, et avant que chacun ne bredouille lamentablement.
D'autre part comme la Banque de France ne communique pratiquement plus qu'en anglais, autant en prendre lĂ -aussi le contrepied !
C'est tout ce que j'ai à dire ; la suite (que l'on peut aussi entendre en lecture sur Grand Angle Crypto) est la traduction de son article, avec ses illustrations, sans commentaires de ma part. J'en aurais bien faits quelques-uns, mais marginaux, notamment sur des points de chronologie. D'autre part certains liens sont restés pointés vers des sources en langue anglaise. Tout cela parce que mes journées n'ont que 24 heures.
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Les nouvelles, ou nouvelles, de cette semaine concernant la capacité du Trésor américain, ou sa volonté, ou simplement sa tentation d'essayer un troll : frapper une piÚce de monnaie en platine d'un trillion de dollars (1 000 000 000 000 $) afin de repousser la limite de la dette du pays m'ont rappelé d'autres lectures monétaires que j'ai faites cet été sous le dÎme de chaleur, lorsqu'il est devenu évident pour beaucoup que le plus grand obstacle à tout nouveau projet de loi sur les infrastructures américaines ne serait pas le plafond de la dette, mais le plancher du CongrÚs.
Cette lecture, que j'ai effectuĂ©e tout en prĂ©parant le dĂ©jeuner Ă l'aide de mon infrastructure prĂ©fĂ©rĂ©e, savoir l'Ă©lectricitĂ©, Ă©tait la transcription d'un discours prononcĂ© par un certain Christopher J. Waller, gouverneur fraĂźchement nommĂ© du 51Ăšme et plus puissant Ătat des Ătats-Unis, la RĂ©serve fĂ©dĂ©rale.
Le sujet de ce discours ? Les CBDC - qui ne sont malheureusement pas une nouvelle forme de cannabinoïde qui vous aurait échappé, mais plutÎt l'acronyme de Central Bank Digital Currencies - le tout dernier danger qui se profile à l'horizon public.
Avant d'aller plus loin, permettez-moi de dire qu'il m'a Ă©tĂ© difficile de dĂ©terminer ce qu'est exactement ce discours - s'il s'agit d'un  minority reportÂ
ou simplement d'une tentative de plaire Ă ses hĂŽtes, l'American Enterprise Institute.
Mais Ă©tant donnĂ© que Waller, un Ă©conomiste nommĂ© Ă la derniĂšre minute par Trump Ă la Fed, exercera son mandat jusqu'en janvier 2030, nous, lecteurs de midi, pourrions y voir une tentative d'influencer la politique future, et plus prĂ©cisĂ©ment d'influencer le  document de discussion de la FedÂ
, tant attendu et toujours à venir - un texte rédigé par un groupe - sur le thÚme des coûts et des avantages de la création d'une CBDC.
Précisons : sur les coûts et les avantages de la création d'une CBDC américaine, car la Chine en a déjà annoncée une, tout comme une douzaine d'autres pays, dont récemment le Nigeria, qui lancera début octobre l'eNaira.
à ce stade, le lecteur qui n'est pas encore abonné à ce Substack peut se demander ce qu'est une monnaie numérique de banque centrale.
Lecteur, je vais vous le dire ou plutÎt je vais vous dire ce qu'une CBDC n'est PAS. Ce n'est PAS, comme Wikipedia pourrait vous le dire, un dollar numérique. AprÚs tout, la plupart des dollars sont déjà numériques, n'existant pas sous la forme d'un objet plié dans votre portefeuille, mais sous la forme d'une entrée dans la base de données d'une banque, interrogée puis restituée fidÚlement sur l'écran de votre smartphone.
(notez que dans tous ces exemples, l'argent ne peut vivre autrement que sous la surveillance de la Banque centrale.)
Une monnaie numĂ©rique de banque centrale n'est pas davantage une adoption de la cryptomonnaie au niveau de l'Ătat - du moins pas de la cryptomonnaie telle que la comprennent actuellement la plupart des personnes qui l'utilisent dans le monde.
Au lieu de cela, une CBDC est plus proche d'une perversion de la cryptomonnaie, ou du moins des principes et des protocoles fondateurs de la cryptomonnaie : une monnaie cryptofasciste, un jumeau malĂ©fique entrĂ© dans les registres le jour opposĂ©, expressĂ©ment conçu pour refuser Ă ses utilisateurs la propriĂ©tĂ© fondamentale de leur argent et pour installer l'Ătat au centre d'intermĂ©diation de chaque transaction.
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Pendant les milliers d'annĂ©es qui ont prĂ©cĂ©dĂ© l'avĂšnement des CBDC, l'argent - l'unitĂ© de compte conceptuelle que nous reprĂ©sentons par des objets gĂ©nĂ©ralement physiques et tangibles que nous appelons monnaie - a Ă©tĂ© principalement incarnĂ© sous la forme de piĂšces frappĂ©es dans des mĂ©taux prĂ©cieux. L'adjectif  prĂ©cieuxÂ
- qui fait rĂ©fĂ©rence Ă la limite fondamentale de la disponibilitĂ© Ă©tablie par la difficultĂ© de trouver et d'extraire du sol la marchandise intrinsĂšquement rare - Ă©tait important, car tout le monde peut triche : l'acheteur sur le marchĂ© peut rogner sa piĂšce de mĂ©tal et en remiser les restes, le vendeur sur un marchĂ© peut peser la piĂšce de mĂ©tal sur des balances dĂ©loyales, et le monnayeur de la piĂšce, qui est gĂ©nĂ©ralement le roi, ou l'Ătat, peut abaisser l'aloi du mĂ©tal de la piĂšce en y mĂȘlant des matĂ©riaux de moindre qualitĂ©, sans parler d'autres mĂ©thodes comme le seigneuriage.
(Contemplez la loi dans toute sa gloire !)
L'histoire de la banque est, Ă bien des Ă©gards, l'histoire de cette dilution. En effet, les gouvernements ont rapidement dĂ©couvert que, par le biais d'une simple lĂ©gislation, ils pouvaient dĂ©clarer que tout le monde sur leur territoire devait accepter que les piĂšces de cette annĂ©e soient Ă©gales Ă celles de l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, mĂȘme si les nouvelles piĂšces contenaient moins d'argent et plus de plomb. Dans de nombreux pays, les peines encourues pour avoir mis en doute ce systĂšme, voire pour avoir signalĂ© la falsification, Ă©taient au mieux la saisie des biens, au pire la pendaison, la dĂ©capitation ou la mort par le feu.
Dans la Rome impĂ©riale, cette dĂ©gradation de la monnaie, que l'on pourrait dĂ©crire aujourd'hui comme une  innovation financiĂšreÂ
, allait servir Ă financer des politiques auparavant inabordables et des guerres Ă©ternelles, pour aboutir finalement Ă la crise du IIIĂšme siĂšcle et Ă l'Ădit de DioclĂ©tien sur le maximum, qui a survĂ©cu Ă l'effondrement de l'Ă©conomie romaine et de l'empire lui-mĂȘme d'une maniĂšre tout Ă fait mĂ©morable :
FatiguĂ©s de transporter de lourds sacs de dinars et de deniers, les marchands aprĂšs la crise du troisiĂšme siĂšcle, et en particulier les marchands voyageurs, ont imaginĂ© des formes plus symboliques de monnaie, et ont ainsi crĂ©Ă© la banque commerciale - la version plĂ©bĂ©ienne des trĂ©sors royaux - dont les premiers instruments et les plus importants furent les billets Ă ordre institutionnels, qui n'avaient pas de valeur intrinsĂšque propre mais Ă©taient garantis par une marchandise : il s'agissait de morceaux de parchemin ou de papier qui reprĂ©sentaient le droit d'ĂȘtre Ă©changĂ© contre une certaine quantitĂ© d'une monnaie ayant plus ou moins de valeur intrinsĂšque.
Les rĂ©gimes qui ont Ă©mergĂ© des incendies de Rome ont Ă©tendu ce concept pour Ă©tablir leurs propres monnaies convertibles, et de petits bouts de chiffon ont circulĂ© dans l'Ă©conomie aux cĂŽtĂ©s de leurs Ă©quivalents en piĂšces de monnaie de valeur symbolique identique, mais de valeur intrinsĂšque distincte. En commençant par l'augmentation de l'impression de billets de banque, en continuant par l'annulation du droit de les Ă©changer contre de la monnaie, et en culminant avec la dĂ©prĂ©ciation de la monnaie elle-mĂȘme par le zinc et le cuivre, les villes-Ătats et plus tard les Ătats-nations entreprenants ont finalement obtenu ce que notre vieil ami Waller et ses copains de la Fed dĂ©criraient gĂ©nĂ©reusement comme une monnaie souveraineÂ
: une belle serviette de table.
(La monnaie souveraine, telle qu'on peut la rencontrer dans l'histoire)
Une fois que la monnaie est comprise de cette maniĂšre, il n'y a qu'un pas Ă franchir entre la serviette de table et le rĂ©seau internet. Le principe est le mĂȘme : le nouveau jeton numĂ©rique circule aux cĂŽtĂ©s de l'ancien jeton physique de plus en plus absent. Au dĂ©but.
Tout comme le vieux certificat d'argent amĂ©ricain en papier pouvait ĂȘtre Ă©changĂ© contre un dollar d'argent brillant d'une once, le solde de dollars numĂ©riques affichĂ© sur l'application bancaire de votre tĂ©lĂ©phone peut encore ĂȘtre Ă©changĂ© dans une banque commerciale contre une serviette verte imprimĂ©e, tant que cette banque reste solvable ou conserve son assurance-dĂ©pĂŽt.
Si cette promesse de rachat vous semble un maigre rĂ©confort, vous feriez bien de vous rappeler que la serviette en papier dans votre portefeuille vaut toujours mieux que ce contre quoi vous l'avez Ă©changĂ©e : une simple crĂ©ance sur une serviette en papier pour votre portefeuille. De plus, une fois que cette serviette en papier est bien rangĂ©e dans votre sac Ă main ou votre porte-monnaie, la banque n'a plus le droit de dĂ©cider, ni mĂȘme de savoir, comment et oĂč vous l'utilisez. Enfin, la serviette en papier fonctionnera toujours en cas de panne du rĂ©seau Ă©lectrique.
C'est finalement l'accessoire idéal pour le déjeuner de tout lecteur.
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Les partisans des CBDC affirment que ces monnaies strictement centralisĂ©es reprĂ©sentent la rĂ©alisation d'un Ă©talon nouveau et audacieux - pas un Ă©talon d'or, ni un Ă©talon d'argent, ni mĂȘme un Ă©talon fondĂ© sur une blockchain, mais quelque chose comme un Ă©talon de feuille de calcul, oĂč chaque dollar Ă©mis par une banque centrale est dĂ©tenu par un compte gĂ©rĂ© par une banque centrale, enregistrĂ© dans un vaste registre d'Ătat qui peut ĂȘtre continuellement examinĂ© et Ă©ternellement rĂ©visĂ©.
Les partisans de la CBDC affirment que cela rendra les transactions quotidiennes à la fois plus sûres (en éliminant le risque de contrepartie) et plus faciles à taxer (en rendant presque impossible de cacher de l'argent au gouvernement).
Les opposants Ă la CBDC, cependant, citent ces mĂȘmes prĂ©tendues  sĂ©curitĂ©Â
et  facilitĂ©Â
pour affirmer qu'un e-dollar, par exemple, n'est qu'une extension ou une manifestation financiĂšre de l'Ătat de surveillance qui ne cesse de s'Ă©tendre. Pour ces critiques, la mĂ©thode par laquelle cette proposition Ă©radique tant les risques de la faillite que les fraudeurs fiscaux dessine une ligne rouge vif autour son dĂ©faut mortel : cela ne se fait qu'au prix de l'installation de l'Ătat, dĂ©sormais au courant de l'utilisation et de la dĂ©tention de chaque dollar, au centre de toute interaction monĂ©taire. C'est le modĂšle chinois, s'Ă©crient les chantres de la serviette en papier. Or en Chine, la nouvelle interdiction du bitcoin ainsi que la mise en circulation du yuan numĂ©rique, ont clairement pour but d'accroĂźtre la capacitĂ© de l'Ătat Ă servir d'intermĂ©diaire - Ă s'imposer au milieu de la moindre transaction.
L'intermĂ©diation et son contraire, la dĂ©sintermĂ©diation, constituent le cĆur du sujet, et il est remarquable de constater Ă quel point le discours de Waller s'appuie sur ces termes, dont les origines ne se trouvent pas dans la politique capitaliste mais, ironiquement, dans la critique marxiste. Ce qu'ils signifient, c'est le point de savoir qui ou quoi se tient entre votre argent et vos intentions Ă son Ă©gard.
Ce que certains Ă©conomistes ont rĂ©cemment pris l'habitude d'appeler, avec une emphase pĂ©jorative suspecte, les  cryptomonnaies dĂ©centralisĂ©esÂ
- c'est-Ă -dire Bitcoin, Ethereum et autres - sont considĂ©rĂ©es par les banques centrales et commerciales comme de dangereux dĂ©sintermĂ©diateurs, prĂ©cisĂ©ment parce qu'elles ont Ă©tĂ© conçues pour assurer une protection Ă©gale Ă tous les utilisateurs, sans privilĂšges spĂ©ciaux accordĂ©s Ă l'Ătat.
Cette crypto - dont la technologie mĂȘme a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e principalement pour corriger la centralisation qui la menace aujourd'hui - Ă©tait, est gĂ©nĂ©ralement, et devrait ĂȘtre constitutionnellement indiffĂ©rente Ă qui la possĂšde et pour quoi faire on l'utilise. Pour les banques traditionnelles, cependant, sans parler des Ătats dotĂ©s de monnaies souveraines, c'est inacceptable : ces concurrents cryptographiques reprĂ©sentent une perturbation historique, promettant la possibilitĂ© de stocker et de dĂ©placer une valeur vĂ©rifiable indĂ©pendamment de l'approbation de l'Ătat, et plaçant ainsi leurs utilisateurs hors de portĂ©e de Rome. L'opposition Ă un tel libre-Ă©change est trop souvent dissimulĂ©e sous un vernis de prĂ©occupation paternaliste, l'Ătat affirmant qu'en l'absence de sa propre intermĂ©diation affectueuse, le marchĂ© se transformera inĂ©vitablement en tripots illĂ©gaux et en repaires de chair oĂč rĂšgnent la fraude fiscale, le trafic de drogue et le trafic d'armes.
Il est toutefois difficile de soutenir cette affirmation lorsque, selon nul autre que le Bureau du financement du terrorisme et des crimes financiers du DĂ©partement du TrĂ©sor amĂ©ricain,  bien que les monnaies virtuelles soient utilisĂ©es pour des transactions illicites, le volume est faible par rapport au volume d'activitĂ©s illicites rĂ©alisĂ©es par le biais des services financiers traditionnelsÂ
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Les services financiers traditionnels, bien sĂ»r, Ă©tant le visage et la dĂ©finition mĂȘme de l'intermĂ©diation - des services qui cherchent Ă extraire pour eux-mĂȘmes une partie de chacun de nos Ă©changes.
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Ce qui nous ramÚne à Waller, que l'on pourrait qualifier d'anti-désintermédiateur, de défenseur du systÚme bancaire commercial et de ses services qui stockent et investissent (et souvent perdent) l'argent que le systÚme bancaire central américain, la Fed, décide d'imprimer (souvent au milieu de la nuit).
(Vous seriez surpris de savoir combien de faiseurs d'opinion sont prĂȘts Ă admettre publiquement qu'ils ne peuvent pas faire la diffĂ©rence entre un tour de passe-passe comptable et l'impression de monnaie.)
Et pourtant, j'admets que je trouve toujours ses remarques fascinantes, principalement parce que je rejette son raisonnement mais que je suis d'accord avec ses conclusions.
L'opinion de Waller, ainsi que la mienne, est que les Ătats-Unis n'ont pas besoin de dĂ©velopper leur propre CBDC. Pourtant, si Waller pense que les Ătats-Unis n'ont pas besoin d'une CBDC parce que leur secteur bancaire commercial est dĂ©jĂ robuste, je pense que les Ătats-Unis n'ont pas besoin d'une CBDC malgrĂ© les banques, dont les activitĂ©s sont, Ă mon avis, presque toutes mieux et plus Ă©quitablement accomplies de nos jours par l'Ă©cosystĂšme robuste, diversifiĂ© et durable des crypto-monnaies non Ă©tatiques (traduction : crypto ordinaire).
Je risque de perdre fort peu de lecteurs en affirmant que le secteur bancaire commercial n'est pas, comme l'affirme Waller, la solution, mais en fait le problĂšme - une industrie parasite et totalement inefficace qui s'est attaquĂ©e Ă ses clients en toute impunitĂ©, soutenue par des renflouements rĂ©guliers de la Fed, grĂące Ă la fiction douteuse qu'elle est  trop grosse pour faire failliteÂ
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Mais mĂȘme si le complexe industriel bancaire s'est agrandi, son utilitĂ© a diminuĂ©, surtout par rapport Ă la cryptomonnaie. Autrefois, les banques commerciales Ă©taient les seules Ă sĂ©curiser les transactions risquĂ©es, en assurant le dĂ©pĂŽt fiduciaire et la rĂ©versibilitĂ©. De mĂȘme, le crĂ©dit et l'investissement n'Ă©taient pas disponibles, et peut-ĂȘtre mĂȘme inimaginables, sans elle. Aujourd'hui, vous pouvez profiter de tout cela en trois clics.
Pourtant, les banques ont un rÎle plus ancien. Depuis la création de la banque commerciale, ou du moins depuis sa capitalisation par la banque centrale, la fonction la plus importante du secteur a été le mouvement de l'argent, remplissant la promesse de ces anciens billets à ordre en permettant leur remboursement dans différentes villes ou dans différents pays, et en permettant tant aux détenteurs qu'aux payeurs de ces billets d'effectuer des transactions en leur nom et au nom d'autres personnes sur des distances similaires.
Pendant la majeure partie de l'histoire, le déplacement de l'argent de cette maniÚre nécessitait son stockage en grande quantité - ce qui nécessitait la sécurité concrÚte des coffres et des gardes. Mais à mesure que l'argent intrinsÚquement précieux a cédé la place à nos petites serviettes de table, et que les serviettes de table cÚdent la place à leurs équivalents numériques intangibles, cela a changé.
Aujourd'hui, cependant, il n'y a pas grand-chose dans les coffres. Si vous entrez dans une banque, mĂȘme sans masque sur le visage, et que vous tentez un retrait important, on vous dira presque toujours de revenir mercredi prochain, car la monnaie physique que vous demandez doit ĂȘtre commandĂ©e auprĂšs de la rare succursale ou rĂ©serve qui en dispose. Quant au gardien, malgrĂ© la place mythologique qu'il occupe dans vos reprĂ©sentations avec le granit et le marbre qu'il arpente, ce n'est plus qu'un vieil homme aux pieds fatiguĂ©s, trop peu payĂ© pour utiliser l'arme qu'il porte.
Voilà à quoi les banques commerciales ont été réduites : des services intermédiaires de commande d'argent qui profitent des pénalités et des frais, sous la protection de votre grand-pÚre.
En somme, dans une société de plus en plus numérique, il n'y a pratiquement rien qu'une banque puisse faire pour donner accÚs à vos actifs et les protéger qu'un algorithme ne puisse reproduire et améliorer, si ce n'est qu'à l'approche de Noël, les cryptomonnaies ne distribuent pas des petits calendriers de bureau.
Mais revenons à l'agent de sécurité de la banque, qui, aprÚs avoir aidé à fermer la banque pour la journée, va probablement exercer un deuxiÚme emploi, pour joindre les deux bouts - dans une station-service, par exemple.
Une CBDC lui sera-t-elle utile ? Un e-dollar amĂ©liorera-t-il sa vie, plus qu'un dollar en espĂšces, ou qu'un Ă©quivalent en bitcoin, ou en un stablecoin, ou mĂȘme en un stablecoin assurĂ© par la Federal Deposit Insurance Corp ?
Disons que son mĂ©decin lui a dit que la nature sĂ©dentaire de son travail Ă la banque a eu un impact sur sa santĂ© et a contribuĂ© Ă une dangereuse prise de poids. Notre gardien doit rĂ©duire sa consommation de sucre, et sa compagnie d'assurance privĂ©e - avec laquelle il a Ă©tĂ© publiquement mandatĂ© pour traiter - commence maintenant Ă suivre son Ă©tat prĂ©diabĂ©tique et transmet des donnĂ©es sur cet Ă©tat aux systĂšmes qui contrĂŽlent son portefeuille CBDC, de sorte que la prochaine fois qu'il va Ă l'Ă©picerie et essaie d'acheter des bonbons, il est rejetĂ© - il ne peut pas - son portefeuille refuse tout simplement de payer, mĂȘme si son intention Ă©tait d'acheter ces bonbons pour sa petite-fille.
Ou bien, disons que l'un de ses e-dollars, qu'il a reçu en guise de pourboire Ă son travail dans une station-service, est ensuite enregistrĂ© par une autoritĂ© centrale comme ayant Ă©tĂ© utilisĂ©, par son prĂ©cĂ©dent dĂ©tenteur, pour effectuer une transaction suspecte, qu'il s'agisse d'un trafic de drogue ou d'un don Ă une organisation caritative totalement innocente et, en fait, totalement favorable Ă la vie, opĂ©rant dans un pays Ă©tranger jugĂ© hostile Ă la politique Ă©trangĂšre des Ătats-Unis, et qu'il est donc gelĂ© et doit mĂȘme ĂȘtre confisquĂ© Ă titre de  geste citoyenÂ
. Comment notre gardien assiégé pourra-t-il le récupérer ? Sera-t-il un jour en mesure de prouver que cet e-dollar lui appartient légitimement et d'en reprendre possession, et combien cette preuve lui coûtera-t-elle en fin de compte ?
Notre gardien gagne sa vie avec son travail, il la gagne avec son corps, et pourtant, lorsque ce corps tombera inĂ©vitablement en panne, aura-t-il amassĂ© suffisamment d'argent pour prendre une retraite confortable ? Et si ce n'est pas le cas, pourra-t-il jamais espĂ©rer compter sur la bienveillance de l'Ătat, ou mĂȘme sur des dispositions adĂ©quates, pour son bien-ĂȘtre, ses soins, sa guĂ©rison ?
C'est la question à laquelle j'aimerais que Waller, que la Fed, le Trésor et le reste du gouvernement américain répondent :
De toutes les choses qui pourraient ĂȘtre centralisĂ©es et nationalisĂ©es dans la vie de ce pauvre homme, est-ce que ce devrait ĂȘtre son argent ?