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77 - Ce qui est sérieux et ce qui l'est moins

By: Jacques Favier —

J'ai dĂ©jĂ  traitĂ© Ă  plusieurs reprises du jeu, univers natif des premiĂšres monnaies qui furent dĂ©crites comme virtuelles. J'avais abordĂ© l'an passĂ© dans Enjeux la rĂ©flexion du mĂ©diĂ©viste Jean-Michel Mehl (« il est exceptionnel que le jeu soit gratuit (...) mĂȘme dans le jeu enfantin, il est facile de dĂ©celer, sous les apparences de la gratuitĂ©, l’espĂ©rance d’une victoire comme la crainte d’une perte ou d’une dĂ©faite, dĂ©finitive et humiliante ») et bien plus tĂŽt dans Monnaie pour rire l'idĂ©e d'un rapport que tous les enfants connaissent bien entre la monnaie et l'univers oĂč l'on fait semblant, voire la fĂȘte des fous.

Podcast

Je reviens sur ce thĂšme en diffusant ici le podcast rĂ©alisĂ©e en mars par Jeanne Dussueil (Globaliz) et au cours duquel Madame Laure de LaraudiĂšre, dĂ©putĂ©e reprĂ©sentant « le prĂ©sent » et moi-mĂȘme parlant pour « le passĂ© » commentions une dystopie future prĂ©sentĂ©e par le conteur Thomas Guyon.

Dans un futur pas si lointain, nous suivions dans ses tribulations et ses angoisses un individu qui avait tout d'un travailleur acharnĂ© sauf que.. pour lui travail n'existait plus si ce n'est dans l'univers d'un jeu video. Gamification la chose est dĂ©jĂ  partout prĂ©sente. Jeanne Dussueil demandait donc Ă  Madame de la RaudiĂšre ce qu'en diraient les politiques (le jour oĂč... plus tard ? trop tard?) et Ă  moi ce qui pourrait bien, alors, d'aprĂšs les enseignements du passĂ©, servir de monnaie.

On pourra Ă©couter le podcast ici (aprĂšs avoir lu ce billet ... et avec nos interventions Ă  partir de la sixiĂšme minute pour ceux que le genre dystopique ennuie...)

Les points d'accord ou de convergence entre la « députée geek » et « l'historien provocateur » ont été assez nombreux. Quant à la gamification de l'économie j'en ai d'abord cité quelques exemples dans le passé :

  • la construction des pyramides, sans doute mue par des considĂ©rations sacrĂ©es ou politiques, peut quand mĂȘme ĂȘtre perçue comme un emploi donnĂ© Ă  la population pour lui Ă©viter l'oisivetĂ©, mĂšre de tous les vices ; quelque chose de parfaitement inutile par rapport Ă  nos besoins naturels, mais que chacun accomplit avec un grand sĂ©rieux (pour rappel les coups de fouets c'est seulement dans Asterix !)
  • l'Ă©conomie des « messes pour le salut des Ăąmes » qui, elle, est Ă  la jonction de ce monde (les prĂȘtres sont bien payĂ©s en espĂšces sonnantes et trĂ©buchantes, en monnaie rĂ©elle comme diraient nos autoritĂ©s) et d'un autre monde, l'au-delĂ  si bien nommĂ© dans lequel ils accomplissent, avec un honnĂȘte niveau de sĂ©rieux, des tĂąches prĂ©cises visant Ă  procurer Ă  des tiers dĂ©funts mais parfaitement identifiĂ©s des avantages virtuels pour continuer de parler comme nos rĂ©gulateurs.

un jeu antique et inutile

LĂ  oĂč j'ai pu me montrer rĂ©ellement provocateur, c'est en ajoutant que l'Ă©conomie du KYC et de la compliance (qui reprĂ©sente dĂ©sormais une part substantielle des recrutements dans le secteur financier et une cause non nĂ©gligeable de la hausse des coĂ»ts refacturĂ©s) est en tout point comparable. ArrĂȘterait-on demain toutes les diligences (les demandes de facture EDF, les appels pour demander Ă  mes 4 enfants le nom de jeune fille de leur mĂšre etc) il ne se passerait rien de tangible, si ce n'est - comme l'arrĂȘt de la construction des pyramides - un chĂŽmage technique pĂ©nible pour les travailleurs concernĂ©s.

J'ai d'ailleurs repris cela sur un billet publié sur LinkedIn et que l'on pourra lire ici :

La vérité, c'est que l'on assiste autant à une gamification de certaines choses sérieuses qu'à une workification de choses futiles, inutiles et tristes.

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61 - Sans l'ombre d'un clocher (le temps c'est de l'argent 2)

By: Jacques Favier —

La Grosse Cloche de BordeauxOn connaĂźt la chanson : la monnaie, jadis frappĂ©e dans du mĂ©tal prĂ©cieux et ornĂ©e de l’effigie du souverain local, aurait connu de fabuleux progrĂšs en se dĂ©barrassant du mĂ©tal pour ne conserver que l’auguste visage, progressivement remplacĂ© par le nom de son banquier sur un bout de papier, puis par une ligne de donnĂ©e dans un fichier de ce dernier. Sans souverain et sans banquier, le bitcoin serait donc « en rĂ©alitĂ© trĂšs archaĂŻque » aux yeux des sages en cravate qui savent bien qu’il ne suffit pas qu’un coquillage soit digital numĂ©rique pour qu'il soit moderne.

Il y a pourtant un Ă©lĂ©ment aussi mystĂ©rieux que la monnaie et qui suggĂšre que la modernitĂ© consiste bien Ă  s'affranchir du pouvoir local, de ses tours, de ses cloches et de ses blasons : c’est le temps.

J'ai écrit il y a un mois un article intitulé la boucle, en partant du mot fameux assurant que le temps c'est de l'argent. Je poursuis ici, en voyant ce que l'évolution de la mesure du temps me suggÚre au sujet de celle de la fabrique de la monnaie.

Pour marquer le passage du temps, la femme de ma vie m’a offert un petit livre bien passionnant, trĂšs accessible pour les non-historiens et qui creuse un peu un problĂšme que la plupart des chroniqueurs laissent dans le flou : Ă  quelle heure prĂ©cise de quel jour prĂ©cis de quelle annĂ©e... tel ou tel Ă©vĂ©nement s’est-il prĂ©cisĂ©ment produit ?

le 30 fĂ©vrierLe 30 fĂ©vrier d’Olivier Marchon est riche en anecdotes amusantes, mais simples Ă  Ă©lucider, comme celle de sainte ThĂ©rĂšse mourant dans la nuit du 4 au 15 octobre 1582 ou celle de Shakespeare et de Cervantes mourant tous deux le 23 avril 1616 avec cependant dix jours d’écart. D'autres faits sont plus Ă©tonnants, comme la dĂ©couverte dans la cathĂ©drale de Salisbury de la tombe d'un enfant qui naquit le 13 mai de l’annĂ©e du Seigneur 1683 et mourut le 19 fĂ©vrier de la mĂȘme annĂ©e.

L’heure elle-mĂȘme est sujet Ă  de peu comprĂ©hensibles variations : avant la rĂ©volution, lorsqu’il Ă©tait 0 heure Ă  Prague (c’est dire, Ă  l’heure bohĂ©mienne, que le soleil venait de s’y lever) il Ă©tait dĂ©jĂ  3 heures du matin Ă  Paris (oĂč l’on se rĂ©glait sur les milieux du jour et de la nuit) et 4 heures du matin Ă  BĂąle (oĂč l’on comptait une heure de plus qu’à l’heure française pour rappeler une ruse de guerre datant de 1444) et mĂȘme 8 heures Ă  Venise oĂč l’on suivait l’heure italienne commençant chaque jour 30 minutes (le temps de dire la priĂšre de l’AngĂ©lus) aprĂšs le coucher du soleil.

En somme chaque pays avait son heure comme il avait sa monnaie, et depuis César donnant son nom au calendrier julien, la mesure du temps était une prérogative "souveraine".

deux pontifes romains qui ont fixé le calendrier

Comme la monnaie n'est pas un poids d'or ou d'argent immuable, le temps n’est pas fait de quelque Ă©lĂ©ment naturel objectif (le temps d’écoulement d’un volume de sable ou d’eau fixe) mais porte la marque du pouvoir politique. Et comme pour la monnaie, cette marque n'est pas un simple poinçon mais bien l'empreinte d'une intention que le prince y imprime, s'il le veut, quand il le veut.

Le passage au calendrier rĂ©formĂ© par le pape GrĂ©goire en 1582 va ainsi s’étaler, pays par pays, jusqu’au 20Ăšme siĂšcle. Du coup, le nombre de jours Ă  rattraper variera aussi. Si prompte Ă  s’afficher moderne, la volontĂ© politique peut s’arc-bouter dans des postures absurdes comme celles des protestants dĂ©crits par Kepler comme aimant mieux ĂȘtre en dĂ©saccord avec le Soleil qu’en accord avec le pape.

La plus vieille horloge de Paris fut installĂ©e en 1371 sous Charles V, sur le mur du Palais royal de la CitĂ©. Notons que dans le mĂȘme bĂątiment, on battit longtemps monnaie...

au 14 Ăšme siĂšcle

Mais insensiblement la technique et la science imposent leurs logiques.

La mĂ©canique de l'horloge impose l’heure Ă  durĂ©e constante : les antiques heures du cadran solaire qui variaient du simple au double entre jour et nuit et d’une saison Ă  l’autre vont progressivement disparaĂźtre.

Les mathĂ©matiques remplacent lentement l’observation des astres, libĂšrent de l'observation des signaux naturels, imposent l’heure française contre ses rivales (mĂȘme si l’heure italienne persiste jusqu’au milieu du 19Ăšme) puis l’heure moyenne (la mĂȘme Ă  Brest et Ă  Strasbourg mais surtout la mĂȘme quelle que soit l’heure prĂ©cise du zĂ©nith) plutĂŽt que l’heure rĂ©glĂ©e sur le midi « vrai ».

Vient ensuite l’influence des rĂ©seaux. Sur les toiles de plus en plus subtiles qu'ils construisent, les hommes apprennent Ă  se mouvoir mieux qu’à l’état de nature. Marcel Proust dit Ă  sa façon que c’est le train qui apprit Ă  l’homme la valeur de la minute.

La prioritĂ© politique n’est plus d’affirmer le prestige d’une mĂ©tropole mais de lui permettre d’ĂȘtre un nƓud sur une toile globale et de vivre Ă  l'heure de cette toile. MĂȘme Ă  l’échelle d’un continent il ne saurait persister une centaine d’heures lĂ©gales. L'harmonisation des horaires ferroviaires amĂ©ricains (1883) est une dĂ©cision qui Ă©mane, notons-le au passage, du secteur privĂ©.

Au siĂšcle du train, l’horloge de la gare (privĂ©e) remplace, pour ainsi dire celles des beffrois et des cathĂ©drales de jadis. Tout un symbole !

au 19 Ăšme siĂšcle

Certes, le vieux monde ne disparait pas par magie. La population peut rĂ©sister, comme en France oĂč l’heure de la gare c’est Ă  dire celle de Paris ne remplace pas forcĂ©ment l’heure usuelle des diverses provinces. En AmĂ©rique ce sont les bourgades, souvent les plus rurales, qui multiplient durant tout le 20Ăšme siĂšcle, les zones horaires, notamment pour refuser l'heure d'Ă©tĂ©.

Leurs dĂ©fenseurs ornaient-ils ces heures locales des vertus sociales dont on pare aujourd’hui les monnaies locales ? Il me semble qu’il y aurait un parallĂšle Ă  faire.

Quand ce n’est pas la population qui fait de la rĂ©sistance, ce sont les pouvoirs publics. C’est en France que se manifesta le plus comiquement ce besoin de « souverainetĂ© » : nous fumes, jusqu'en 1911, le dernier pays Ă  refuser le temps de Greenwich adoptĂ© un quart de siĂšcle plus tĂŽt et Ă  faire des 9’21’’ qui nous sĂ©paraient du reste du monde un prĂ©cieux Ă©lĂ©ment de notre identitĂ©. Ce souverainisme intempestif semble dĂ©cidĂ©ment une constante !

Mais le pouvoir de l'Etat est désormais celui des "affaires" ou du moins il se confond trop bien avec elles.

30 avril 1916L'histoire de l'heure d'été, que la radio rabùche assez réguliÚrement (et j'écris durant le week-end de changement d'heure) est à cet égard assez emblématique. Ce fut d'abord, en 1916, une mesure de guerre, la vraie, celle que l'on fait avec des canons. AprÚs les "chocs pétroliers", elle fut rétablie comme utile à la guerre au gaspi, aujourd'hui elle est simplement maintenue parce qu'elle est réputée bonne pour les affaires. Un glissement que l'on comparera avec la désinvolture croissante des pouvoirs publics vis-à-vis de la monnaie, décrochée de l'or pour fait de guerre, dépourvue de sens pour cause de crise, puis créée ex nihilo parce que cela donne de l'air aux affaires.

Entre l'apologie du easing et celle des longues soirées d'été, suis-je le seul à voir un parallélisme ? En tout cas il est amusant de noter que c'est à Benjamin Franklin, l'homme de time is money) que l'on doit d'avoir le premier énoncé, dans le "Journal de Paris" de 1784, l'idée de bouger l'heure pour bouger les gens.

La vérité serait (depuis Eschyle?) la premiÚre victime des guerres. Suivent la monnaie et... l'heure. La guerre est la matrice du calendrier. En été ou en hiver, la France vit à l'heure allemande depuis le 15 juin 1940. Cette persistance de l'heure allemande semble un vrai tabou. Comme le franc, né en 1360 de la défaite de Poitiers, notre heure actuelle est un leg de la déroute de 40. Troublant. Disons donc que c'est l'heure continentale, et passons...

On a dit du train qu'il aplatissait le monde, on le dit aujourd'hui de l'Internet. Cela ne peut pas ĂȘtre sans consĂ©quence sur la mesure du temps, d'autant que si le train se rĂ©glait Ă  la minute, les algorithmes fonctionnent aujourd'hui Ă  la nanoseconde.

1955

Comme l'avait fait l'horloge mécanique, l'horloge atomique (1955) représente un vrai changement de cadre.

L'internet est un continent plat et non sphĂ©rique, sans rotation quotidienne ni rĂ©volution annuelle. Comme son absence de frontiĂšre et de distance le mettait en quĂȘte d'une monnaie propre, comme son absence de trust demandait que cette nouvelle monnaie fĂ»t un cash, les caractĂ©ristiques que je viens d'indiquer excluent un repĂ©rage sur des astres qui continuent de tourner en rond (et encore) mais dont les mouvements ne sont plus aussi immuables que jadis. Pensez donc : la rotation de la terre dure 2,75 ms de plus qu'en 1820 !

Les chevaux du Soleil s'essoufflent. Qu'en auraient dit grecs et romains ? Qu'en aurait pensé le Roi Soleil de Versailles ?

le char du soleil, Ă  Rome et Ă  Versailles

Nous vivons dĂ©jĂ  sans le savoir un Ɠil sur chaque horloge. Depuis que la seconde a Ă©tĂ© dĂ©finie (en 1967) par rapport aux tribulations d'un Ă©lectron tournant autour d'un noyau de celsium ( pour parler comme O.Marchon) il faut rĂ©introduire de temps Ă  autre une 86.401Ăšme seconde Ă  certaines annĂ©es, la derniĂšre en date ayant Ă©tĂ© 2015. Et ceci juste pour maintenir une concordance entre l'annĂ©e atomique et l'annĂ©e "vraie", concordance dont le cyberespace n'a pas forcĂ©ment besoin ! Voire qui le gĂšne, quand cette fichue seconde intercalaire cloue au sol des avions, perturbe moteurs de recherche et navigateurs et oblige Ă  fermer par prĂ©caution les places boursiĂšres.

Supprimer la seconde intercalaire reste cependant une décision difficile à prendre, car revenant à couper un nouveau lien à la nature. O. Marchon la décrit comme un fragile rempart devant cette lame de fond qui tend à plonger l'homme vers toujours plus de virtualité.

Bitcoin (dont j'ai dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© la temporalitĂ© propre, puisqu'il a crĂ©Ă© la premiĂšre chronologie intrinsĂšque Ă  l'Internet) vit dans cette virtualitĂ© lĂ . Peut-ĂȘtre difficile Ă  apprĂ©hender intimement, mais rĂ©solument du cĂŽtĂ© du futur quoi qu'en disent ceux qui ne le comprennent pas. Vires in numeris

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57 - La Boucle (le temps, c'est de l'argent)

By: Jacques Favier —

Time is money. Le mot cĂ©lĂšbre de Benjamin Franklin courait semble-t-il les rues depuis le grec Antiphon, qui aurait dit le mĂȘme chose avant de mourir exĂ©cutĂ© en -410, ce qui est en somme une façon de faire faillite.

Le problĂšme c'est que chacun formule cette analogie dans un contexte et un propos bien diffĂ©rents. Le libertaire hĂ©doniste antique trouvait sans doute stupide de perdre un temps comptĂ© Ă  travailler dans une vaine quĂȘte de fortune ou d'honneurs. Mais son mot (*) est rapportĂ© par un historien dissertant cinq siĂšcles plus tard au sujet d'une perte de temps fatale Ă  l'action. Enfin l'amĂ©ricain modeste, tĂŽt mis au travail, trouvait impie de perdre Ă  ne rien faire une heure qui pouvait ĂȘtre consacrĂ©e au nĂ©goce. Aucun des trois ne parlait Ă©videmment du travail de l'argent, travail qui consiste essentiellement, au grand scandale des moralistes, Ă  attendre l'Ă©chĂ©ance en regardant passer le temps.

la clepsydre de karnakOn Ă©voque classiquement ce que l'on doit Ă  nos ancĂȘtres babyloniens, qui conçurent en regardant le ciel le temps cyclique, celui que l'on retrouverait. Les Égyptiens, eux, regardaient couler dans leurs clepsydres le temps que l'on perd. Et ce n'est pas pour rien que l'on parle d'argent liquide. Il file entre les doigts comme le temps dans la clepsydre.

Mais depuis les Grecs, et mĂȘme depuis les LumiĂšres, le temps et l'argent ont tous deux changĂ© de nature. Que faire aujourd'hui du lieu commun mĂ©taphorique de Franklin?

Au commencement, l'argent, valeur intrinsÚque et concrÚte qu'en français on désigne par le nom d'un métal précieux mais par essence stérile, ne pouvait guÚre croßtre en faisant travailler le temps, qui n'appartient qu'à Dieu. Il pouvait cependant s'amasser avec le temps de travail de l'homme. Ainsi accumulé il devenait une potentialité dans le temps à venir, la célÚbre liberté frappée de Dostoïevski.

Certes, dans leurs Ă©choppes, de vils usuriers le prĂȘtaient contre d'impies intĂ©rĂȘts. Au bout de quelques gĂ©nĂ©rations ils furent nobles, fournissant aux rois crĂ©dits et maitresses puis, au prix de quelques victimes collatĂ©rales, survĂ©curent aux rĂ©volutions et s'installĂšrent au pouvoir. Au bout du compte, l'argent aujourd'hui n'est plus que ce qu'on leur doit Ă  eux.

Le voleur de tempsUn Ă©conomiste espagnol, spĂ©cialiste de l'innovation, et qui est aussi romancier, Fernando Trias de Bes, a publiĂ© en 2006 une satire amusante Ă  ce sujet. Le hĂ©ros ne travaille essentiellement que pour payer les intĂ©rĂȘts de ses emprunts. Il a un jour l'idĂ©e de vendre du temps. Son entreprise devient florissante, mais si les gens achĂštent du temps c'est pour ne rien faire... et l'Ă©conomie ne tourne plus. Il faut lĂ©gifĂ©rer...

Sans me vanter, j'y avais songĂ© moi-mĂȘme 20 ans plus tĂŽt (*) dans un scenario oĂč c'Ă©tait l'État lui-mĂȘme qui prenait cette initiative. Pour le reste, je renvoie Ă  mon billet sur le livre de Maurizio Lazzarato Gouverner par la Dette.

Et le temps ?

time machineEn assénant réguliÚrement que le temps n'existe pas ou que son écoulement est une illusion, le physicien Thibault Damour provoque des polémiques diverses (*). Le temps, tel qu'en parle Etienne Klein (*) échappe au langage, à la philosophie et à la mathématique. Mais il ne semble pas perturber les financiers.

À ma connaissance, nul dĂ©biteur ne l'a invoquĂ© pour contester le bien-fondĂ© des intĂ©rĂȘts dus. Au demeurant le temps des banques est spĂ©cifique, purement conventionnel. Ses unitĂ©s sont contractuelles, les annĂ©es n'y ont que 360 jours et le mot jour fait l'objet de longues dispositions.

Personne n'a réussi à remonter dans le temps ( j'y reviens dans un instant) pour rembourser moins que le nominal.

Le bitcoin est une monnaie qui entretient une relation bien plus complexe avec une temporalitĂ© elle-mĂȘme spĂ©cifique.

C'Ă©tait par une rĂ©flexion proprement « chronologique » que Bayer, Haber et Stornetta en Ă©taient arrivĂ©s en 1993 Ă  construire un horodatage numĂ©rique intrinsĂšque : « pour Ă©tablir qu’un document a Ă©tĂ© crĂ©Ă© aprĂšs un moment donnĂ©, il est nĂ©cessaire de rapporter des Ă©vĂ©nements qui n’auraient pu ĂȘtre prĂ©dits avant qu’ils ne soient arrivĂ©s. Pour Ă©tablir qu’un document a Ă©tĂ© crĂ©Ă© aprĂšs un moment donnĂ©, il est nĂ©cessaire de provoquer un Ă©vĂ©nement suscitĂ© par ce document et qui puisse ĂȘtre constatĂ© par des tiers. » Le vieux sophisme post hoc ergo propter hoc trouvait enfin un fondement technique.

La succession linĂ©aire des blocs a suscitĂ© le premier temps universel propre au cyberespace, ou du moins sa premiĂšre chronologie. L'historique de la Blockchain est en effet certain et irrĂ©versible, mais surtout il est autonome. MĂȘme si l'on trouve un peu partout qu'un nouveau bloc est validĂ© toutes les 10 minutes environ, le tic-tac de cette montre n'est pas ajustĂ© sur la rotation de la terre ou les oscillations de l'atome de cesium.

out of time

De plus ce tic-tac irrĂ©gulier ne suit pas ce que les mathĂ©maticiens appellent une loi normale mais une loi exponentielle, comme celle qui rĂ©git les passages du bus. C’est une loi qui modĂ©lise la durĂ©e de vie d'un phĂ©nomĂšne sans mĂ©moire, sans vieillissement et sans usure, d’un phĂ©nomĂšne pour lequel le fait qu’il ait dĂ©jĂ  durĂ© un certain temps jusqu’au temps t ne change rien Ă  son espĂ©rance de durĂ©e Ă  partir du temps t.

Le temps de la blockchain sous le principe d'incertitude

Dans une Ă©tude (*) rĂ©servĂ©e aux lecteurs fĂ©rus de science, le mathĂ©maticien Ricardo Perez-Marco commence par rappeler le statut du temps dans la mĂ©canique quantique, et la part de mystĂšre ou de controverse qui l'entoure encore. Ensuite il note que le temps de la blockchain est un temps spĂ©cifique (toute rĂ©fĂ©rence Ă  un temps exogĂšne violerait en effet le principe de dĂ©centralisation) mais qu'il est fonction d'une donnĂ©e exogĂšne : l'Ă©nergie consacrĂ©e au hash. À tout moment on a une incertitude sur ∆E, et finalement une Ă©quation ∆E = k.H (oĂč H est le hashrate). Par lĂ , c'est le principe d'incertitude de Heisenberg qui pointe le bout de son nez. Car on a un systĂšme de type ∆E.∆t∌ħ0 oĂč la constante de Planck rĂ©duite, ħ0, est fonction de la difficultĂ© du moment.

bitcoin et le tempsNous voilà bien! Comme dit l'ami Cyril Grunspan, ça laisse songeur...

Ce que ne dit par le mathématicien, c'est que quelque part il doit y avoir une corrélation, voire une équation que je suis bien incapable de proposer (d'autant que la difficulté et la récompense sont deux valeurs discrÚtes) entre la difficulté, donc le temps, et la valeur de la récompense, donc le cours du bitcoin. Le temps c'est de l'argent.

Comment l'argent lui-mĂȘme voyagerait-il dans le temps ?

Les gestionnaires de (grosses) fortunes peuvent parfois envisager des placements sur des échéances dépassant sensiblement l'espérance de vie humaine. Ils ne devraient pas tarder à venir à Bitcoin.

Il y a eu une expérience concrÚte de voyage dans le temps : lorsque les pays de l'Est ont entrepris dans les années 90 de restituer les biens confisqués à la fin des années 40. Ceux qui retrouvÚrent des forets ou des immeubles s'en trouvÚrent mieux que ceux qui avaient perdu des actions ou des comptes en banque. Cela a-t-il fait l'objet d'études ?

Un film de science-fiction trĂšs malin et considĂ©rĂ© comme un modĂšle, Looper livre une rĂ©ponse trĂšs simple (et bien peu techno !) Ă  la question de savoir en quel argent un ĂȘtre du futur pourrait nous payer aujourd'hui : en lingots d'argent. Sans banque et sans État.

l'argent des loopers

Dans Looper, des tueurs à gage reçoivent, d'un futur dans lequel la surveillance électronique a rendu le meurtre un peu difficile, des victimes ligotées portant quelques lingots d'argent cousus dans leur camisole. S'ils trouvent des lingots d'or, c'est que ...

Le mot looper vient du mot anglais qui dĂ©signe une boucle. Les boucles s'imposent fatalement aux scĂ©naristes de voyages dans le temps. Souvent, un rien de quantique et un soupçon d'univers jumeaux ou parallĂšles permettent de trouver des solutions cosmĂ©tiques. Évidemment la boucle concerne ici d'abord le destin du tueur lui-mĂȘme. Mais la circulation de l'argent y forme aussi une curieuse figure.

Je renvoie en revanche à un commentaire savant (en anglais) sur les raisons du choix de l'instrument de paiement. Cela nécessiterait un billet entier.

vers le futurAu grand dĂ©sespoir du geek adepte du Bitcoin et de la SF, et mĂȘme si Bitcoin est beaucoup plus proche d'un mĂ©tal prĂ©cieux que d'un bout de papier fiduciaire ou d'une Ă©criture dans une banque, il est clair que la chronologie intrinsĂšque de la blockchain interdirait un tel paiement vers le passĂ© et que la solution de Looper est bien plus crĂ©dible !

Consolons-nous de cette frustration sans grande conséquence pratique :

Bitcoin, qui permet des paiements aisés vers le futur lointain, est une monnaie d'à-venir !






Pour aller plus loin :

  • Tous les sites amĂ©ricains renvoient de Franklin (in Advice to a young tradesman) Ă  Antiphon. Ensuite, c'est une autre histoire. Le mot du sophiste devait dĂ©jĂ  ĂȘtre un lieu commun dans l'antiquitĂ©, car on ne le trouve que de seconde main, dans le chapitre 28 de la vie d'Antoine par Plutarque, dans lequel l'historien trouve navrant que le hĂ©ros Ă  la tĂȘte de linotte se soit laissĂ© entraĂźner par ClĂ©opĂątre Ă  Alexandrie, oĂč il dĂ©pensa, dans l’oisivetĂ©, dans les plaisirs et dans des voluptĂ©s indignes de son Ăąge, la chose la plus prĂ©cieuse Ă  l’homme au jugement d’Antiphon, le temps. Pour mon ami Adli Takkal Bataille : ÎżáŒŽÏ‡Î”ÏƒÎžÎ±Îč Ï†Î”ÏÏŒÎŒÎ”ÎœÎżÎœ ᜑπ' Î±áœÏ„áż†Ï‚ Δጰς áŒˆÎ»Î”ÎŸÎŹÎœÎŽÏÎ”ÎčαΜ ጐÎșΔῖ ÎŽáœČ ΌΔÎčραÎșÎŻÎżÏ… ÏƒÏ‡ÎżÎ»áœŽÎœ áŒ„ÎłÎżÎœÏ„ÎżÏ‚ ÎŽÎčατρÎčÎČÎ±áż–Ï‚ Îșα᜶ παÎčÎŽÎčÎ±áż–Ï‚ Ï‡ÏÏŽÎŒÎ”ÎœÎżÎœ, áŒ€ÎœÎ±Î»ÎŻÏƒÎșΔÎčÎœ Îșα᜶ ÎșÎ±ÎžÎ·ÎŽÏ…Ï€Î±ÎžÎ”áż–Îœ τ᜞ Ï€ÎżÎ»Ï…Ï„Î”Î»Î­ÏƒÏ„Î±Ï„ÎżÎœ áœĄÏ‚ ገΜτÎčÏ†áż¶Îœ ΔጶπΔΜ áŒ€ÎœÎŹÎ»Ï‰ÎŒÎ±,τ᜞Μ Ï‡ÏÏŒÎœÎżÎœ. Le mot áŒ€ÎœÎŹÎ»Ï‰ÎŒÎ± signifie "dĂ©pense, perte" et il est explicitĂ© par Ï€ÎżÎ»Ï…Ï„Î”Î»Î­ÏƒÏ„Î±Ï„ÎżÎœ, qui signifie "trĂšs coĂ»teuse".
  • Le bon temps, ma petite nouvelle datant de 1986 sur le principe de la vente de temps.
  • Un article sur Thaibault Damour et une polĂ©mique riche en invectives dans les commentaires
  • L'article citĂ© de Ricardo Perez-Marco sur le temps de la Blockchain et le principe d'incertitude d'Heisenberg
  • J'ajoute aprĂšs publication la prĂ©sentation filmĂ©e d'un cours d'Etienne Klein suggĂ©rĂ©e par un de mes lecteurs : le temps entre le piĂšge du philosophe pour qui le problĂšme aurait Ă©tĂ© rĂ©solu par tel ou tel philosophe et l'illusion du taupin pour qui le temps est la variable t.
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36 - Alice (suite)

By: Jacques Favier —

Comme on me le fait remarquer en commentaire sous mon précédent billet, il y a bien un petit cÎté subversif dans "Alice au pays des Merveilles" qui a tout pour faire fondre de plaisir le petit coeur endurci de tout Bitcoineur, entre deux achats spéculatifs, celà va sans dire.

J'aimais Alice bien avant de rencontrer le bitcoin, et il me semble bien que son voyage au Pays des Merveilles ait été le premier livre que j'ai lu en intégralité dans la langue qui était encore, à l'époque, de l'anglais.

Si son escapade de l'autre cĂŽtĂ© du miroir m'a permis de comprendre pourquoi le bitcoin que l'on dit virtuel in the old room Ă©tait bien rĂ©el lĂ  oĂč les devises fiat devenaient virtuelles, son odyssĂ©e dans le pays des merveilles suscite en moi une autre remarque.

Alice paye de sa personne. Elle boit la potion.

Alice boit

Comme on sait, cela n'est pas sans consĂ©quence. Alice rĂ©trĂ©cit. Il y a Ă©videmment une lecture Ă©vangĂ©lique de la mĂ©taphore du RĂ©vĂ©rend Dodgson : Alice accepte de se faire toute petite car si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux (Mathieu, 18,3). C'est une des lignes fortes des Ă©vangiles, et JĂ©sus lui-mĂȘme en rend grĂące Ă  Dieu : Tu as cachĂ© ces choses aux sages et aux intelligents, et les as rĂ©vĂ©lĂ©es aux tout-petits. ( Mathieu, 11, 25)

Mais pour Alice, au-delà de cette forme d'humilité curieuse ( de curieuse humilité?) il y a deux choses remarquables : elle accepte de boire, et elle en est transformée.

AnaxagorasAujourd'hui, il ne se passe pas de semaine sans que l'on nous apprenne que telle ou telle institution réfléchit au bitcoin, ou réfléchit sur la blockchain pour éviter les mots qui fùchent. Seulement, comme le disait un sage zen, ce n'est pas en lisant la notice de la boite mais en avalant le médicament que l'on peut espérer guérir. L'homme pense parce qu'il a une main comme le disait Anaxagore de ClazomÚnes cinq siÚcles avant le Christ. Assister à une conférence, lire un livre, c'est une chose. Acheter un paper wallet, télécharger une appli wallet, se servir d'un hardware vault, c'est utile aussi.

Alice en sort transformée : plus petite, plus souple. Est-ce exactement cela que les institutions qui réfléchissent désirent, ou justement ce qu'elles craignent ? Des organisations plus petites ? Des hiérarchies plus courtes ? Des contrats de travail plus brefs ? Des temps de réaction (beaucoup) plus courts ?

En tout cas la potion n'est pas destinée à entretenir celui qui la boit dans son état, mais bien à en changer.

Alice suit le lapin. Lui sait qu'il est en retard. Il ne réfléchit pas, il court

le lapin en retard

Pour aller plus loin : (ajouté début janvier 2016)

☐ ☆ ✇ La voie du àžżITCOIN

35 - Alice

By: Jacques Favier —

Il y a des phrases que l'on entend dix fois sans trop les écouter et puis qui vous saisisse soudain. Ainsi, lors d'une présentation des potentialités de la technologie blockchain, de l'assertion selon laquelle on pouvait y faire circuler une devise virtuelle comme le bitcoin, mais aussi des devises bien réelles comme l'euro. Je levai la main, et remarquai que sur la blockchain, c'était le bitcoin qui était la chose en soi, alors que ne circuleraient jamais que des promesses, des représentations, des contrats relatifs aux devises fiat.

une devise virtuelle

S'ensuivit une courte controverse sur le sens des mots. Soudain je réalisai que nous avions raisons tous les deux, mais chacun dans son univers.

Et alors l'image me vint Ă  l'esprit.
Le bitcoineur, comme Alice, passe de l'autre cÎté du miroir.

Through the looking glass

Dans le monde des sens physiques, celui qu'Alice appelle the old room, dans ce qui est pour nous le monde des États territoriaux, l'euro est bien rĂ©el.

A dĂ©faut de tinter sur le comptoir, il peut encore se glisser dans la poche. mĂȘme dĂ©materialisĂ©, rĂ©duit Ă  une simple Ă©criture comptable que l'on manipule par carte ou par tĂ©lĂ©phone, il se raccroche Ă  cette rĂ©alitĂ© tangible primitive. Le bitcoin, lui, n'y ressort physiquement de ses wallets que via une plateforme d'Ă©change. Entre temps, il a peut-ĂȘtre une valeur, mais son destin est virtuel.

Mais dans le monde d'Internet, au contraire, l'euro ne circule que sous la forme d'une reprĂ©sentation Ă©lectronique parfaitement duplicable. Il ne retrouve sa vis operandi, sa capacitĂ© de payer ou de solder, qu'avec l'attestation d'une banque qui empĂȘche le double usage qui le viderait de toute substance. Entre temps, il est en puissance, il est virtuel.

En revanche le bitcoin, tel qu'il est sur sa blockchain, est tout entier, l'ĂȘtre et le signe, bien rĂ©el dans ce monde de signes et de lois mathĂ©matiques.

De l'autre cÎté du miroir, Alice découvre que les livres sont écrits à l'envers, ben sûr, en dépit du bon sens pourrait-on dire et que tout est un peu crypté : it seems very pretty, but it's 'Rather' hard to understand se dit-elle pour ne pas avouer qu'elle n'en comprend pas tout.

De l'autre cÎté du miroir (comme le bitcoin sur la blockchain) des objets sont vivants.

Mais surtout on suit, de l'autre cÎté du miroir, de bien étranges rÚgles physique. Le livre a pourtant été écrit des décennies avant les révolutions de la relativité ou de la physique quantique ! Ainsi Alice doit-elle courir vite... pour rester sur place. Ce qui paraßt une métaphore trÚs appropriée au bitcoin qui ne se déplace sur le Ledger plus vite que l'euro dans les réseaux de ses banques, que parce qu'il ne se déplace en réalité pas du tout.

Le paysage, de l'autre cĂŽtĂ© du miroir, est ordonnĂ© selon des postulats mathĂ©matiques, ceux des Ă©checs. Au dĂ©but de la partie, les piĂšces ne se font elles pas face comme de part et d'autre d'un miroir ? Leurs mouvements mĂȘme sont rĂ©gis par des rĂšgles formelles.

un paysage mathématique

un livre rĂ©volutionnaireS'il quitte l'univers de Lewis Caroll pour explorer celui du RĂ©vĂ©rend Charles Dodgson, une surprise attend l'adepte des Ă©changes dĂ©centralisĂ©s. Les tenants de la dĂ©mocratie liquide (un modĂšle oĂč chacun pourrait activement contribuer Ă  l’élaboration de la loi plutĂŽt que de simplement voter sur des propositions, comme dans le modĂšle classique de la dĂ©mocratie directe) savent bien que le pĂšre d'Alice avait Ă©crit quelques annĂ©es plus tard The principles of parliamentary representation, un pamphlet proposant la modĂ©lisation mathĂ©matique d'une allocation des siĂšges en scrutin de liste et d'une forme de dĂ©mocratie oĂč chacun puisse rĂ©ellement exprimer ses prĂ©fĂ©rences, car pour l'instant (et j'Ă©cris un jour de scrutin!) la politique n'est toujours jouĂ©e que more as a game of skill than a real test of the wishes of the electors.

Il est sans doute inutile de nier que l'expérience du bitcoin est liée à une sensibilité politique.

Ce qu'Alice va chercher de l'autre cÎté du miroir, ce sont donc des choses bien réelles. De quoi nous donner, au minimum, des clés pour questionner l'ordre du monde de ce cÎté-ci...

Pour en savoir plus :

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